Aquabio (version initiale)

Publié le par DonaSherif

Pour Martine ! Et sa très jolie lecture ! ;)


 

" Aujourd'hui j'ai cru trépasser pour de bon. « C'est fini » j'ai dit.

Des jours j'ai attendu, des jours qu'elle ne vient plus… Autrefois pourtant, sa main verte et légère, m'entretenait avec soin et j'offrais au regard, une faconde de verdure, délirante et touffue. Et à l'acmé A l'apogée de mon règne végétal, je faisais la fierté de toutes ses étagères à plantes vertes !

Aujourd'hui, c'est fini... Me voila haut perché dans l'ombre et le silence… Aucun rai de lumière, aucune nourriture. A peine un chagrin d'eau, il y a longtemps… Ma guîpure vieillissante, mes racines racornies, mon terreau mycosé sont aussi les témoins des plantes abandonnées qui trônent à présent, déchues, dans la maison déserte…

Je joue de toute la palette du verdâtre … Des scrofules de sécheresse boutonnent mes feuilles dénervurées et j'expire, exsangue … C'est le cancer de la soif !...
Des cadavres de mouches nécrosés salissent le lino, au loin on entend le bruit des autos qui jamais ne s'arrêtent... on étouffe !...

Parfois, j'ai encore des spasmes de sève, des fantasmes de sempervirence… des image de forêts équatoriales, ces forêts toujours vertes : paradis végétal, l'Olympe des plantes vertes !

!… Les meubles obombrés dans l'ombre du salon fermé sont les spectres inquiétants et pourtant familiers de ces fins de journée où disparaissent, petit à petit les radicelles aigries et désespérées des ces plants herbacés entrés en agonie.

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Et puis d'un coup, une gerbe de lumière, un incendie de jour inonde la pièce : la maison est ouverte, on ouvre les fenêtres et ça rit et ça piaille à tous vents !

Et puis déjà, une coupe autoritaire, des ciseaux janissaires qui happent la fanure, déboisent les tresses. Et, comble de bien-être... enfin !... De l'eau ! J'ose espérer renaître ! De l'eau ! … Une joie campanile inonde mes racines, je renais, je revis, je suis à nouveau lierre !

Un bonheur torpide inonde mes pousses ! Et bientôt c'est … L'épectase aquatique... la délivrance enfin ! Le recommencement ! La symphonie de la palingénésie végétale !

Et elle, tout en beauté, gaillarde et bronzée, s'écrie vers le mari :

- T'as vu pour le lierre hein ! Il était temps de rentrer ! "

 

 

Publié dans La Parole aux choses

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